L’assemblée  nationale  a  adopté le  jeudi  29  septembre  2016  le projet de  Loi  relatif  à  la transparence,  à  la  lutte contre  la  corruption  et  à  la  modernité  de  la  vie  économique,  dite  Loi Sapin II.

L’article 21 bis du projet de loi Sapin 2 vise à créer un régime macro-prudentiel pour le secteur de l’assurance, régime qui pourrait s’appliquer en cas de crise généralisée (systémique).

Il  comprend  plusieurs  mesures  visant  à  renforcer  les  pouvoirs  du  Haut  Conseil  de  Stabilité Financière  créé  par  la  « loi  de  séparation  et  de  régulation  des  activités bancaires » du 26 juillet 2013, et chargé « d’exercer la surveillance du système financier dans  son ensemble, dans le but d’en préserver la stabilité et la capacité à assurer une contribution soutenable à la croissance économique ».

La loi Sapin 2 crée ainsi un régime de protection du secteur de l’assurance en cas de crise majeure. Il donne au Haut Conseil de Stabilité Financière les prérogatives suivantes :

  • Moduler les règles de constitution et de reprise de la participation aux bénéfices pour les organismes d’assurance ou une partie d’entre eux ;
  • Intervenir pour prendre à l’égard des organismes d’assurance ou d’une partie d’entre eux les mesures conservatoires suivantes, pour une période de trois mois renouvelable :

1) Limiter temporairement l’exercice de certaines opérations ou activités, y compris l’acceptation de primes ou versements ;

2)  Suspendre ou restreindre temporairement la libre disposition de tout ou partie des actifs ;

3) Suspendre, retarder ou limiter, pour tout ou partie du portefeuille, le paiement des valeurs de rachat, la faculté d’arbitrages ou le versement d’avances sur contrat ;

4) Limiter temporairement la distribution d’un dividende aux actionnaires, d’une rémunération des certificats mutualistes ou paritaires ou d’une rémunération des parts sociales aux sociétaires.

Notons tout de même que les capitaux versés suite au décès d’un assuré et au profit des bénéficiaires désignés ne pourraient subir de blocage.

Les prérogatives données au Haut Conseil de Stabilité Financière ont pour objectif de pallier les conséquences d’une crise globale et majeure mettant en péril la stabilité du système financier. Derrière ces termes génériques se cache en réalité plusieurs menaces parfaitement identifiées et sur lesquelles nous vous sensibilisons déjà depuis plusieurs années :

  1. La remontée brutale des taux d’intérêt. Ce mouvement pourrait alors entraîner un rachat massif des capitaux investis sur les fonds en euro par les assurés qui chercheraient alors de nouveaux produits d’épargne plus rentables. Les compagnies d’assurance, pour satisfaire ces demandes massives de rachats, seraient alors contraintes de vendre, dans la précipitation, les obligations qu’elles détiennent générant ainsi d’importantes moins-values et menaçant leur solvabilité.
  1. La poursuite de la baisse des taux d’intérêt. Alors que nous sommes déjà à des niveaux très bas (0.15 % pour une obligation émise à 10 ans par l’Etat Français) une poursuite de la baisse des taux pourrait ne plus permettre aux assureurs de prélever les frais de gestion sur les rendements des fonds en euro. Là encore, les compagnies d’assurance devraient puiser massivement dans leurs fonds propres, menaçant leur solvabilité.

Malgré le caractère contraignant des mesures de sauvegarde pouvant être prise par le Haut  Conseil  de  Stabilité Financière et le sentiment pour l’épargnant de ne plus pouvoir disposer librement de son épargne, nous invitons nos clients à ne pas perdre de vue :

  • d’abord, le caractère temporaire de ces dispositions ;
  • ensuite, l’objectif recherché par le législateur au travers de cette Loi.

Il s’agit avant toute chose d’apporter les réponses adéquates et suffisantes à une crise majeure de liquidité, si elle devait intervenir, appelant ainsi des mesures exceptionnelles et ce dans l’objectif de protéger notre système assurantiel ainsi que l’épargne des assurés présent sur les contrats d’assurance vie.

Notons également que ces dispositions ne sont que la transposition des mesures existantes pour le secteur bancaire pour lequel le Haut Conseil de Stabilité Financière a déjà été habilité par le législateur en vue de prendre, le cas échéant, ces décisions exceptionnelles.

A l’heure à laquelle nous publions cet article, le Sénat à adopté ce jeudi 3 novembre, non sans le modifier, le texte de loi en seconde lecture. Celui-ci fera l’objet d’une ultime lecture par les députés qui auront le dernier mot ce mardi 8 novembre. Nous ne manquerons pas de vous tenir informés des dispositions définitives du texte de loi et des éventuelles dispositions à prendre en matière patrimoniale.

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